Premier jour en Afrique
Vendredi 1er mai.
Pour la première fois de ma vie, je foule le sol africain, à Ceuta l'enclave espagnole.
J'arrive à la frontière, où règne une certaine agitation qui cependant ne semble pas atteindre les douaniers marocains, qui eux prennent tout leur temps, à un moment les fameuses douanières femmes réputées plus dures à corrompre, font leur apparition, et viennent secouer les puces de leurs collègues masculins. Beaucoup de français, qui se sont offerts des vacances prolongées, des aventuriers de tous poils, des 4 X 4, des espagnols qui s'offrent une escapade pour le grand week end, un allemand avec un vieux camion Magirus Deutz aménagé en camping car, et au milieu de tout ça, des marocains qui distribuent des feuilles de renseignements contre quelques dirhams, je refuse prudemment toute proposition, l'un m'invite même à le suivre mais y a pas moyen je reste à côté de la bécane.
Une mamie espagnole avec sa grosse Mercedes, qui semble avoir l'habitude grille la politesse à tout le monde, et obtient son laisser passer au bout de 5 minutes, sans même lâcher un seul petit billet. Je me dis que si l'entrée est trop casse-couilles ils iront se faire voir, et je garderai mes devises pour l'Europe.
Enfin passé, un marocain regarde la plaque et voit 34, on parle 2 minutes, il me souhaite la bienvenue au Maroc, je continues ma route, les villes et paysages ne sont pas très différents de ceux de l'Espagne, tout est très propre, les gendarmes attendent des proies avec leur jumelles radars, je roule tranquille, pas de bêtises pour le moment.
Je traverse ma première grosse ville, marocaine, Tetouan, qui ressemble à une ville espagnole, un poil plus bordélique, avec des vieux bus qui roulent capot ouvert, et les grands taxis Mercedes pleins à ras bord.
J'arrive enfin sur Chefchaouen, deux piétons acceptent de me prendre en photo le contact est très amical, j'ai l'impression d'être remonté 30 ans en arrière.
J'arrive au camping, la montée est ardue, Gertrude a un peu de mal, un peu avant le camping des jeunes me font signe de la main pour me demander si je veux du Kif...
A l'entrée le gardien est super sympa, il me souhaite la bienvenue au Maroc se présente, Ibrahim un jeune d'environ 18 ans, lui aussi a un deux roues qu'il est très fier de me montrer, un petit 50 d'apparence Honda, en fait un ancien modèle Honda fabriqué sous licence par un constructeur chinois, j'en verrai de partout par la suite...
Pour le moment tout commence plutôt bien, pourvu que ça dure...
Au camping je fais connaissance d'un jeune couple de hippies bretons, Jean Marc et Jenny, leurs deux enfants Timéo 5 ans environ et leur petit bébé dont je ne me souviens plus le nom (désolé). Comme chaque année, la petite famille, passe la période qui va de la moitié du printemps à la moitié de l'automne au royaume de sa majesté Mohammed VI, M6 pour les intimes. Leur camping car est un vieux camion Mercedes LP réaménagé, ils ont aussi à leur disposition un petit Dax Honda qui leur sert de véhicule léger pour les excursions en ville, ils arrivent tous à monter dessus pour le moment...
Autre voisin du camping, Harry un anglais qui lui a déjà 15 jours de Maroc derrière lui. Il voyage avec sa jeune compagne une "Aussie" en Suzuki Hayabusa leurs bagages se limitent à deux top case latéraux, un top case et une sacoche de réservoir avec tapis. Eux ont fait l'inverse de moi en longeant d'abord la côte puis en allant dans les terres. Harry m'explique ses mésaventures depuis son entrée dans le Rif, du genre les mecs qui te collent au cul en bagnole pour que tu leur achètes du Kif, pas facile de les semer malgré la puissance de l'Hayabusa, les routes défoncées n'étant pas le terrain de prédilection de la bête... Il m'explique aussi qu'à chaque arrêt il y a toujours quelqu'un pour venir tendre la main, ou vendre quelque chose dont il n'ont rien à faire...
Harry n'a pas touché un joint depuis la fin de ses études, la réponse adéquate pour se débarrasser de ses gens reste donc : "Allez vous en" en français dans le texte accompagné d'un geste de la main...
Je saurai à quoi m'en tenir pour la suite, en plus de ce que m'a raconté Jean Marc du genre le Dax tombe en panne un peu avant le camping de suite des soi-disant (zaama) mécanos proposent leur service, Jean Marc refuse poliment, le temps d'aller trouver la bonne bougie en ville, le moteur du Dax est désossé, grosse colère de Baba cool pour récupérer tout le matos, et en plus les mecs ont le culot de demander de la thune pour le service rendu...
Jean Marc ajoutera qu'il ne faut pas hésiter à pousser des gueulantes si besoin est, la société Marocaine est un système machiste...
Petit arrêt manger dans un boui boui, le cuistot à une sale tête de voleur, toutes les informations sont en arabe, il m'annonce un prix qui est certainement plus élevé car en scrutant le menu en arabe, je ne vois aucun chiffre qui correspond... Le rire caché d'un jeune du coin, corrobore mon hypothèse, ce même jeune est lui même risible, il porte un vieux blouson jaune de montagne un peu fatigué avec écrit en catalan "École de ski de Cerdagne pyrénnées", la longue histoire de nos vêtements...
Pour ce qui est de la visite de Chefchaouen, je passe à côté, un peu dégouté par les mœurs de certains autochtones un peu moins amicaux que ceux du matin. Pour le moment le seul endroit que je connaisse où on peut acheter des herbes douces l'esprit serein reste la Hollande, à Chefchaouen comme partout ailleurs, malgré son omniprésence, s'en procurer amène à se retrouver avec des gens peu fréquentables, et au comportement malsain.
Je ne donnerai pas plus de détails sur cet épisode, car je l'ai un peu cherché en n'écoutant pas les précieux conseils qui m'avaient été données. Je m'en sors pas trop mal, je suis en un seul morceau, je n'ai pas subi de violences, je n'ai pas dû verser une somme astronomique, je n'ai pas été racketté juste bien "touristé" comme il faut et surtout je m'en remettrai...
Petite précision quand à la violence. Son usage par les autochtones est très rare, le tourisme étant une manne pour le pays, les voyageurs ont un statut privilégie, et tout marocain leur faisant du mal risque très très gros, surtout dans les campagnes où tout le monde se connaît, les autorités obtenant les informations nécessaires plus à coup de claques et téléphone arabe, qu'à coups de clics sur internet. Matériel commun aux deux méthodes, la souris dont l'utilisation diffère, d'un côté sur le tapis et de l'autre dans le... Bref, je laisse le lecteur imaginer car je compte retourner un jour au Maroc.
Tout ça pour dire que humer du hmmm hmmm, ce n'est pas bien, qu'on peut s'en passer et que mettre une bonne baffe au gamin qu'on surprend en train de le faire c'est rendre service à l'adulte qu'il sera plus tard.
Je fais tout de même une photo de la place centrale. Chefchaouen ne sera pas la première Médina visitée.
Un peu dépité, je rentre au camping, pas loin de l'entrée alors que je suis "enfin" seul histoire de respirer un peu, un jeune vient en rajouter une couche, il insiste au moins 5 fois pour que je vienne avec lui voir comment on fabrique le chocolat magique dans la montagne. Ça sera sans façon j'ai eu ma dose pour aujourd'hui, et puis c'est pas le moment de se retrouver paumé dans la montagne à l'approche de la nuit. Je décide de ne pas sortir de la soirée, le lendemain je m'en irai direction Al Hoceima 200 kilomètres plus loin sur la côte méditerranéenne.
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